L’industrie agroalimentaire française a perdu 5000 emplois en 2013. Cela représente 1% des effectifs. En parallèle, pas un supermarché n’a mis la clef sous le paillasson.


Le marketing de la grande distribution est-il en train de tuer l’agroalimentaire français ?
Petit mais costaud

L’agriculture voulue par la Général de Gaulle à la sortie du second conflit mondial est en train aujourd’hui de tourner au vinaigre. En effet, le pays agricole autosuffisant semble ne plus être dans l’hexagone.
Et pourtant, la France est une véritable référence dans cette industrie, avec ses fabricants, ses distributeurs, sa prestigieuse école AgroParisTech, considérée comme la meilleure école d’agronomie d’Europe.
La destruction des emplois dans l’industrie agroalimentaire devient récurrente, et pourtant les marges dans le secteur augmentent. Apparemment, des acteurs défaillants sont morts et par effet de levier, la médiane des marges de l’agroalimentaire a augmenté. La moyenne de la marge du secteur est donc tombée de 34% à 22%, ce qui reste tout à fait confortable pour une industrie.
L’agroalimentaire contribue positivement au solde commercial français. Les exportations en 2013 du secteur s’élèvent à plus de 11 milliards d’euros. Ce sont des PME qui constituent la quasi intégralité de l’industrie agroalimentaire (97%). Alors, ce sont ces petites entreprises agiles qui sont capables d’exporter, et les acteurs élus se désintéressent de ce tissu entrepreneurial, en quête de high-tech. Or, cela existe réellement dans l’agronomie et l’agroalimentaire. En témoignent toutes les recherches appliquées en unités mixtes de recherches (comme en environnement et grandes cultures).

Un marketing créatif et des enseignes de distribution peu conscientes

Même si l’Association Nationale de l’Industrie Agroalimentaire (ANIA) a tiré la sonnette d’alarme auprès du ministre de l’agriculture, Monsieur Stéphane le Foll, le phénomène de baisse des prix s’est accéléré et pourrait conduire à une situation de déflation.
Les enseignes de la grande distribution se livrent une concurrence acharnée où tous les moyens sont bons pour piquer des parts de marchés. Et finalement, ceux qui trinquent sont les agriculteurs, l’industrie du vivant,…qui représentent 13 000 producteurs de l’alimentaire. En face, les enseignes de la grande distribution peuvent se compter avec les doigts des deux mains.
Alors, pour être attractive, une enseigne va redoubler d’efforts en termes de marketing, et trouver tout un tas d’artifices pour vendre mieux. Les yaourts sont de plus en plus petits en contenance avec un prix de vente qui dans un premier temps n’a pas trop bougé. Et cela n’a pas suffi, alors pour baisser les prix sans rogner les marges, il suffit de faire un effort sur les achats, et c’est toute la filière agroalimentaire qui est touchée de plein fouet.

Complexité de la demande

Les décisionnaires ont changé. Ce ne sont plus des spécialistes de l’agroalimentaire qui décident de passer un marché, et qui sont capables d’évaluer le produit : ce sont dorénavant les acheteurs. Leur performance s’évalue selon les économies générées pour leur Groupe de distribution. Le marketing se charge de vendre les produits au consommateur, et pour cela il éduque ces clients finaux à des envies éphémères, qui induisent une saisonnalité et une variété complexe des produits.
Au-delà, le fait de baisser les prix, peut conduire à des écueils pouvant porter atteinte à la sécurité alimentaire. Il n’a jamais été aussi important d’analyser le contenu de son assiette avant de passer à table. C’est un véritable gâchis à la fois industriel et social.