L’explosion de la plateforme pétrolière Deepwater Horizon au large du Golfe du Mexique a causé une catastrophe écologique de grande ampleur et a engendré des préjudices financiers importants pour le groupe BP, propriétaire de l’installation. Celui-ci a vu ses actions en Bourse diminuer de 50 % depuis l’accident. Le puissant major britannique va-t-il réussir à faire face à ce double cataclysme ?


BP se remettra-t-elle de la marée noire du Golfe du Mexique ?
Une existence menacée

Dès les premières fuites de pétrole brut dans le Golfe du Mexique, les actions du groupe BP ont commencé à chuter. Une baisse lente qui paraissait même remettre en cause l’avenir de la société. Jon Najarian, le fondateur du portail d’informations optionMonster.com, soulignait à l’époque que la capacité de survie de British Petroleum était en jeu. Au fil du temps, la facture à payer pour la compagnie britannique s’allonge : financement des opérations de nettoyage, remboursement des dommages,  aides allouées aux États touchés par la catastrophe et forage des puits de secours.

En juin 2010, le coût de la marée noire s’élève à 1,43 milliard de dollars pour atteindre 6 milliards en octobre de la même année. Pour faire face à la pression, notamment de l’administration Obama, BP débloque 20 milliards de dollars en vue d’une indemnisation des victimes du désastre. Le groupe britannique constitue un total de 32 milliards de provisions pour faire face à toutes les charges inhérentes à ce sinistre. Certains analystes estiment que la facture définitive pourrait s'élever à plusieurs dizaines de milliards de dollars, compte tenu des actions en justice, inévitables dans ce genre de situation. Si UBS avance le chiffre de 9,7 milliards, Crédit Suisse indique un montant vertigineux de 37 milliards de dollars.

Des risques mal jaugés

Si les causes exactes de l’explosion de la plateforme restent inconnues, les analystes montrent du doigt les politiques de réduction des coûts excessives pratiquées par les entreprises, notamment celles de l’industrie pétrolière. Ainsi, BP a ignoré les recommandations internes de ses collaborateurs concernant la sélection de l’architecture de la section finale du puits. Une autre option plus sécurisée aurait coûté entre 7 et 10 millions de dollars de plus à BP mais cette solution lui aurait peut-être évité de payer des dizaines de milliards de dollars. Cette négligence peut s’expliquer par l’existence d’une loi américaine datant de 1900 qui plafonne à 75 millions de dollars les indemnités qui peuvent être réclamées à une compagnie pétrolière dans le cas d’une marée noire.

Outre le risque financier que la catastrophe fait peser sur BP, il convient de souligner que ce sinistre a amené les spécialistes à évaluer les risques extrafinanciers dans toute gestion d’actifs. Ainsi, les analyses de l’Investissement Socialement Responsable (ISR) deviennent d’actualité et permettent de mesurer la responsabilité sociale des entreprises (RSE). Les chercheurs avancent que la performance future d’une entreprise peut être influencée de façon substantielle par les critères extrafinanciers, dont les plus importants sont les indices relatifs à l’action sociale et environnementale. D’autant plus que depuis 2009, les investisseurs institutionnels constituent 69 % du segment et que ceux-ci se montrent particulièrement touchés par les enjeux de l’ISR.

Une réelle aptitude à se ressaisir

Malgré les risques financiers et les préjudices réels qui pèsent sur l’image de British Petroleum, la compagnie arrive néanmoins à se ressaisir. Sa capacité à répartir ses dommages et intérêts dans le temps et ses possibilités d’emprunt qui restent colossales lui permettent d’obtenir des liquidités importantes : 29 milliards de dollars en 2009. Pour le deuxième trimestre de l’année 2013, le groupe a réalisé un bénéfice ajusté de 2 ,71 milliards de dollars contre 3,6 milliards pour la même période de l’année dernière. Cette baisse s’explique par les effets pervers d’une taxe en Russie où BP possède des gisements ainsi que par la hausse du cours du dollar.

Par ailleurs, l’analyste Mark Fletcher, stratège de Citigroup, juge que BP est capable de supporter des charges supplémentaires de 10 milliards de dollars par an depuis 2011. En effet, à l’issue de l’année 2009, le groupe détient des ressources estimées à 63 milliards de barils et un actif de plus de 18 milliards de barils de réserve prouvée. De l’autre côté, les indemnisations se poursuivent. Rien que pour le second trimestre 2013, BP a dû régler 1,4 milliard de dollars à titre de compensation, outre les 500 millions déjà versés au cours du premier trimestre. Selon le pétrolier, le fonds d’indemnisation ne compte plus que 300 millions de dollars.