Les Stratégies




21 Septembre 2013

Au début des années 2000, IBM considère que le marché du PC arrive au terme de son cycle industriel. Big Blue se recentre depuis sur des segments plus porteurs, parmi lesquels figure le Cloud Computing. Plus qu'une simple révolution technique, l'informatique « en nuage » représente un véritable levier de croissance et de modernisations à long terme pour le géant américain.


IBM et le Cloud Computing
Un secteur d'avenir

Les premières traces du cloud computing remontent en 1950. Il faudra néanmoins attendre le début des années 2000 pour voir cette forme de gérance de l'informatique émerger et prendre réellement de l'envol auprès des professionnels et des particuliers. Les outils collaboratifs – wikis, Linux, etc. —, le CRM et surtout les courriels électroniques figurent parmi les premières applications développées et déployées en cloud computing. Les géants d'internet et de l'informatique ne comptaient pas s'arrêter en si bon chemin, vu la marge de développement et le potentiel de croissance de la dématérialisation. Dans ce registre, IBM n'a pas hésité à céder la totalité de son activité PC au chinois Lenovo, pour « seulement » 1,24 milliard de dollars. Le choix d'IBM surprend à l'époque nombre d'observateurs.

Et pourtant, dix ans après, cette décision est amplement justifiée par les résultats du groupe et par la tournure que prend le marché. En effet, le cloud computing, secteur vers lequel Big Blue s'est concentré depuis une décennie, s'impose comme l'avenir de l'informatique particulier et professionnel. Le marché mondial de l’« infonuagique » devrait par ailleurs peser 105 milliards d'euros dès 2014. Rien qu'en France, IBM estime à 19 % la part des investissements dédiés à ce secteur dans deux ans. Plus que les particuliers, les entreprises seront les principales usagères du cloud : 90 % d'entre elles utiliseront au moins un service cloud dans leur activité à l'horizon 2015. Selon les prévisions officielles, 80 % des applications se baseront sur le cloud et son univers d'ici 2020.

Une stratégie basée sur l'investissement et l'innovation

Même si IBM s'est recentré dès 2004 sur le cloud computing, elle n'a réellement adopté de stratégie claire sur cette activité qu'à partir de 2009. Certes, la firme d'Armonk propose depuis presque une décennie une multitude de services cloud, entre autres Idea Factory, Blue Cloud, ou encore iDataPlex. Ces offres demeurent néanmoins séparées et ne permettent aucune interaction ni combinaison susceptible d'intéresser un grand nombre d'utilisateurs. La définition de sa stratégie cloud en 2009 constitue dès lors un grand pas pour le groupe. Cette décision place la firme au moins au même niveau que ses principaux concurrents – Hewlett-Packard, EMC, Symantec, Dell et Cisco Systems – qui ont instauré leur ligne de conduite du cloud un an auparavant.

Concrètement, l'ambitieux plan d'IBM repose sur trois éléments essentiels. D'abord, le groupe souhaite renforcer ses investissements dans la recherche et le développement d'infrastructures, de solutions, d'applications et de plateformes autour desquelles s'articuleront ses offres cloud. Si avant 2011, la société cumule 3 milliards de dollars d'investissements dans l'infonuagique, cette somme est appelée à évoluer. Les récentes acquisitions de Softlayer et de la technologie de stockage Flash, respectivement pour 2 milliards et 1 milliard de dollars, en sont les preuves irréfutables. Sans oublier les 7 Datacenters et 11 laboratoires dédiés au cloud répartis sur quatre continents et prêts à répondre aux demandes des entreprises et particuliers de plusieurs dizaines de pays.

Grâce aux fruits de ces investissements, IBM compte déployer une multitude d'offres cloud innovantes. Stockage de données de l'ordre du zettaoctet (1021 octets), enrichissement des prestations SaaS/PaaS/IaaS, fourniture de capacités de calcul ou encore harmonisation d'outils informatiques éparpillés aux quatre coins du globe... telles sont quelques-unes des innovations possibles avec le renforcement des capacités et infrastructures cloud d'IBM.

Des partenariats élargis

Malgré l'envergure de son réseau de datacenter et ses infrastructures IT, IBM privilégie les partenariats avec d'autres acteurs du cloud. « Big Blue » accorde de ce fait une importance primordiale aux activités de ses filiales comme CoreMetrix, Cognos ou Unica. La place de Juniper Networks dans la nébuleuse d'associés d'IBM reste à part. Cette enseigne s'assure en permanence de l'interconnectivité de tous les « nuages » — les parcs de datacenter, de serveurs et d'applications – du groupe d'Armonk. En dehors des filiales et fournisseurs comme Juniper Networks, IBM collabore avec nombre d'autres opérateurs IT, que la firme classe dans cinq catégories différentes selon leurs fonctions. Fournisseurs de logiciels, revendeurs services, hébergeurs, éditeurs/intégrateurs et créateurs d'appliance sont ainsi indissociables de sa stratégie cloud.

Au final, la stratégie cloud computing d'IBM vise clairement à faire du groupe le leader mondial de cette activité dans un futur proche. Virginia « Ginni » Rometty, la directrice générale, ne s'en cache pas. La tâche ne sera pas pour autant facile, reconnaît-elle. Elle, qui a assisté et participé au lancement du PC trente ans plus tôt, sait combien il est difficile de populariser un produit innovant, tout en résistant à la concurrence. Elle bénéficie néanmoins du soutien et de la confiance de ses collaborateurs, qui voient en elle la garante du succès de la stratégie cloud de « Big Blue ».