Les Stratégies




20 Septembre 2013

Inconnu il y a encore quelques années, Criteo revendique aujourd’hui le titre de leader mondial du ciblage publicitaire et du « retargeting », à juste titre. La start-up française devient en même temps un modèle de réussite pour nombre de créateurs d'entreprise. Pourquoi cette enseigne suscite-t-elle autant d'intérêt ? Quels sont les secrets de sa réussite ?


Criteo, la start-up française des records
Un record de précocité

La belle histoire de Criteo commence en 2005, quand Jean-Baptiste Rudelle et deux ingénieurs des Mines, Romain Nicolli et Franck Le Ouay, décident de créer leur propre entreprise. La start-up se positionne d'abord sur le marché des systèmes de recommandation en ligne, sans grand succès. Ses dirigeants décident de prendre le virage du ciblage publicitaire et du marketing à la performance en 2008, année durant laquelle l'activité de l'enseigne a réellement décollé. Durant les cinq exercices suivants, Criteo connait une ascension fulgurante, jamais enregistrée par une entreprise de son calibre en France. Un récent rapport du cabinet Deloitte place en effet la start-up à la tête des structures à la plus forte croissance ces cinq dernières années, avec un taux de progression de... 202 100 %. Concrètement, ses revenus sont passés de quelques milliers d'euros à 310 millions d'euros sur la période 2008-2013.

Au regard d'un tel rythme de croissance, on est en droit d'espérer une expansion similaire à celle de Facebook ou de Google pour la start-up française. Cette dernière s’imagine d'ailleurs en prochain « Google français » de la publicité, une ambition tout à fait réalisable vu son potentiel. L'entreprise possède actuellement des locaux dignes des plus grandes firmes mondiales dans 15 pays. D'autres projets d'installations en Asie, en Amérique latine et en Afrique sont en cours. L'entreprise n'écarte pas l'éventualité d'une entrée en bourse, opération risquée, mais qui pourrait la placer dans le cercle fermé des plus grandes firmes d'Internet.

Un modèle de performance et d'expertise

Quand les start-ups d'internet et les éditeurs ordinaires attendent entre 10 et 15 ans pour se faire connaître à l'international, Criteo a franchi ce palier en moins de 5 ans. Il faut dire que la firme a intelligemment utilisé tout son potentiel pour y parvenir. L'enseigne mise avant tout sur l'expertise et la qualité de son personnel. Là où les autres sociétés manquent de techniciens et d'ingénieurs qualifiés, 40 % des 800 salariés de Criteo sont hautement qualifiés. Ces scientifiques, que Jean-Baptiste Rudelle qualifie de « professionnels dévoués », constituent une grande valeur ajoutée pour son activité. L'apport de ces ingénieurs contribue largement à la fiabilité et à la performance de la technologie de la start-up. Et pour cause, ces experts se trouvent à la base du rendement élevé de ses campagnes ciblées.

Pour mieux comprendre le rôle des ingénieurs dans la structure de l'enseigne, il faut plonger au cœur de son business-modèle. L'activité de Criteo se base avant tout sur la diffusion de messages publicitaires, à une personne ou catégorie de personne définie, au moment adéquat. Les sociétés qui font appel à sa technologie souhaitent généralement toucher un maximum de prospects, et spécialement les profils ayant déjà acheté sur leur site. Leur objectif ? Obtenir le plus de clics sur les publicités et optimiser ainsi leur ROI. Or, Criteo fait partie des rares opérateurs capables de leur garantir un taux de clics élevé grâce à ses algorithmes de sélection de profils et son importante base de données.

Un leadership assumé

Contrairement aux autres start-ups d'internet et de la haute technologie, Criteo n'a pas attendu d'être racheté ou aidé par de grands groupes industriels pour connaître le succès. Ses dirigeants ont su préserver l'intégrité de l'enseigne tout au long de sa croissance, la protégeant des multiples tentatives d'acquisitions et de fusions même si l'entreprise a accepté l'entrée au capital de gros investisseurs ces cinq dernières années, en marge de son plan de développement et d'internationalisation. Elle garde toutefois le plein contrôle de ses technologies et de son business-modèle.

Désormais solide leader du marché du « retargeting », Criteo compte bien le rester le plus longtemps possible. Ainsi, la firme ne se contente pas d'exploiter au mieux le potentiel de ses technologies, elle consacre également une part importante de son budget aux travaux de R&D. Le transfert de son pôle recherche vers un laboratoire flambant neuf de 10 000 m² au cœur de Paris va dans ce sens. La présence de ses antennes à Palo Alto, en plein Silicon Valley, et à Shoreditch – le nouveau cœur high-tech de Londres — s'inscrit également dans sa volonté d'être toujours au plus près de l'innovation. Dernièrement, Criteo s'est offert AD-X Tracking, une start-up britannique spécialiste du marketing à la performance pour mobiles. Ce rachat est un signal fort pour tous les acteurs d'internet européens ou étrangers : Criteo joue définitivement dans la cour des grands. Qui aurait parié un penny sur une telle ascension il y a encore cinq ans ?